Devant « l’ampleur des dégâts », ou plutôt du retard à combler, je me sens obligée d’agir pour ceux qui souhaitent avoir des nouvelles de notre parcours (qui ne s’est pas arrêté en Inde il y a 5 mois de cela contrairement à ce que le blog pourrait faire penser). Nous allons donc vous raconter, de manière plus succincte (désolés pour ceux qui aiment les longs récits détaillés), la suite de nos aventures au pays aux mille contrastes, l’Inde.
Il est temps de quitter Zamthang pour continuer nos découvertes. Nous posons donc notre casquette associative pour reprendre celle de touristes trekkeurs. L’équipe qui nous encadre est composée d’un horseman, et ses 4 chevaux, d’un cuisinier et d’un assistant. Nous partons pour un trek qui durera au total 5 jours et demi. Notre première étape est une (re)mise en route. Après 15 jours dans l’école, notre organisme est acclimaté à l’altitude, mais plus vraiment endurant ! Nous débutons par une marche d’une heure et demi avant d’arriver au premier village. Un chemin sur les hauteurs de la rivière, à flanc de montagne, toujours dans cette ambiance rocailleuse et poussiéreuse. Pas de place pour la végétation ici. Zamthang est derrière nous, notre regard se porte devant, vers le futur, le fameux col de Shingo La, point culminant de notre trek, que nous passerons dans quelques jours. Nous découvrons les talents de notre « cooker-guide ». La cuisine, plus que le guidage, est son domaine de prédilection. Au menu, pour se mettre en appétit, chai et petits gâteaux, on enchaîne sur une soupe de pâtes un peu épicée puis on « termine » par le dîner : chiapati ou riz, avec des légumes cuits façon wok, dal (lentilles dans un jus) accompagné d’un dessert à base de fruits coupés dans une crème anglaise. Nous voilà repus pour passer une bonne nuit sous le ciel étoilé…
Le lendemain, une journée de 7h de marche nous attend. Nous poursuivons notre route sur le bord de la rivière, pas de gros dénivelé mais à cette altitude (environ 4000m), le moindre effort se fait ressentir. Nous poursuivons notre alternance de paysages désertiques et de villages, petites tâches vertes comme perdues au milieu de cette nature hostile. Nous traversons Testa, un charmant village, qui fait penser à une bourgade des Alpes : petites rues, grosses maisons, l’odeur de bouse et d’herbe chauffée au soleil, les enfants qui courent dans les ruelles, les vieilles portes en bois tannées par les hivers. Arrivés à l’intersection entre Tangso et Kargyak, notre horseman, nous explique qu’il vit tout près et nous propose de passer la nuit dans sa famille. Ainsi, les chevaux pourront se reposer dans des champs d’herbe fraîche, nous n’aurons pas à monter la tente, et la cuisine n’en sera que plus simple. Nous découvrons un peu plus, combien l’invité est à l’honneur. Nous ne devons surtout rien faire. Nous restons cloués au tapis à attendre les mets arriver un à un. Nous serons aussi « obligés » de dormir dans la pièce familiale tous les 2, alors que la famille dort dans la salle à manger et que notre équipe devra finalement dormir dehors dans la tente !!! Nous avons beau expliquer que nous préférons que tout le monde dorme au chaud, ils refusent tous catégoriquement notre offre. Nous en sommes plus que gênés. Laure durant cette journée a subi encore quelques déboires digestifs (vive l’Inde!), nous permettant de faire quelques pauses régulières dans les villages et rendant l’attention de l’équipe quasi obsessionnelle sur son état de santé ! Une bonne nuit de repos et le yaourt fermenté local auront tôt fait de la remettre sur pied.
Notre troisième journée consiste à poursuivre la rivière jusqu’au pied du col Shingo La. Dernière journée avant le grand effort. La marche dure également 6h. Nous commençons la journée sur un flanc de montagne admirant la migration des yaks avec les Drogsa, un magnifique troupeau canalisé par une dizaine d’hommes avançant doucement vers de nouveaux pâturages. Nous passons le village de Kargyak, le dernier village de la vallée puis entamons une longue traversée qui semble nous mener au bout du monde. De nombreux groupes de chevaux nous dépassent : c’est la rentrée des classes… Donc beaucoup d’enfants de la vallée, accompagnés de quelques adultes se rendent à Manali pour la nouvelle année scolaire. Une dernière épreuve nous attend et inquiète notre guide depuis le matin: la traversée de la rivière. Nous sommes obligés de nous déchausser pour traverser pied nus les courants glacés. En une traversée, nos pieds sont gelés et nous n’osons imaginer ceux de notre guide qui, toujours avec la plus grande prévenance, a traversé au moins 5 fois le courant pour nous aider et porter nos sacs. Mais ici, il n’y a pas de place pour se plaindre… Nous arrivons finalement au pied du col en milieu d’après midi. Nous nous posons dans un camp de fortune où se montent les tentes des familles accompagnant leur enfant à l’école, au bord de la rivière. Dans un coin, une échoppe construite le plus simplement du monde avec 4 murs de pierres et une toile faisant office de toit, permet d’acheter des biscuits, boissons, cigarettes, et sert aussi des plats pour un bon repas ou le fameux Chai indispensable à la vie locale.
Le jour J est arrivé. Après un démarrage en douceur, nous entamons la vraie montée. Nous croisons nos derniers yaks, prenons notre temps pour ménager nos organismes et finalement, apercevons le col au pied d’un énorme glacier. Le col est couvert de drapeaux de prière et de kataks. Nous restons dans cet endroit magique le temps de prendre quelques photos et de profiter de notre petit record personnel (5090 m tout de même). Nous voici plus haut que le Mont Blanc. Mais la météo nous rappelle vite à l’ordre, il fait très froid là-haut et il nous reste encore du chemin à parcourir. Nous entamons la descente, la tête encore dans les nuages de cet instant tant désiré et pourtant trop court. Après 2 heures de descente au pas de course sous une pluie fine, nous établissons le camp de base. La soirée est agréable avec l’équipe que nous commençons à connaître, malgré notre anglais approximatif à tous.
Notre dernière étape sera assez courte, car de l’autre coté, dans l’autre vallée, la route gagne également du terrain et le trek perd de son charme. Finis la plénitude du silence, les bruits des pias (marmottes locales) sur les bords de la rivière, le petit chemin où ne passe qu’une personne à la fois tracé par tant de pieds depuis tant de générations, le temps de parler avec un homme sur son cheval. Ici, la route apporte les jeeps, le bruit, mais aussi pour eux, les marchandises, l’électricité… Bref, le confort moderne auquel nous aspirons tous ! Après nos 10 derniers kilomètres, que nous faisons en jeep, nous arrivons finalement à Darcha, petit village au bord d’une route. Ici, l’architecture est toute autre, plus de maisons blanches au toit plats couverts de bouses et d’herbes, plus de champs d’orge. Nous sommes revenus à la civilisation. Nous profitons de notre dernier bon repas cuisiné par notre cooker préféré et de notre dernière nuit sous la tente. Notre trek se fini officiellement ici. Demain, le bus est commun mais notre équipe ne fait que rentrer chez elle. La vallée du Zanskar s’éloigne mais nous garderons longtemps tous ces souvenirs en mémoire, toutes ces rencontres authentiques et sincères dans nos coeurs…
Le lendemain nous partons en bus direction Manali, la grande ville. Notre premier voyage en bus en Inde ne nous épargne rien. Encore une expérience difficile à décrire et qu’il faut vivre au moins une fois dans sa vie. Le principe, vous vous imaginez sur une route de montagne étroite et sinueuse comme il faut, à 4000 ou 5000 m d’altitude pour passer un col, avec une bonne grosse pluie (forcément la météo est toujours là pour s’en mêler sinon ça serait moins drôle), le tout rendant la vieille route déjà défoncée en un vaste terrain de jeux. Prêts à vous amuser ? Prenez 2 camions ou bus plus pourris les uns que les autres (3 pour plus de suspense) et faites les se croiser (voire se doubler) à fond la caisse… Les roues bien sûr doivent se trouver à moins de 2 cm du précipice sinon plus c’est triché (j’aimerais pouvoir vous dire que j’exagère mais même pas, la preuve en image de notre vue de la fenêtre du bus). Il ne vous reste plus qu’à dormir (c’est la solution que j’ai adopté) ou lire (pour Simon) pour oublier que vous êtes peut être en train de vivre les derniers instants de votre vie. Sans parler, bien évidemment, de vos bagages qui sont sur le toit, vaguement attachés avec un malheureux bout de corde prêté par d’autres touristes aussi inconscients que vous, et vous priez très fort pour que les bringuebalements incessants du bus pendant 10 heures d’affilée n’envoient pas vos bagages valdinguer vers d’autres horizons sachant que vous avez tout votre vie dedans !!! Et 10h, nous vous jurons que cela peut être long, très long…
Enfin, on vous rassure, on est restés bien vivants pour vous raconter nos aventures et les agrémenter de quelques photos (par ici pour ceux qui ne les ont pas encore vues).