La suite de notre aventure namibienne a pour décor la Kunene region. Pour l’atteindre, nous devons faire un peu travailler notre 4×4 et commencer à emprunter les routes secondaires. En Namibie, il y a 2 ou 3 grands axes goudronnés, pour le reste il s’agit de « gravel roads » (pistes) et de pistes de mauvaise qualité. Au début, nos conducteurs en chef (Simon et Petra) restent hyperattentifs. Mais cela n’empêche pas d’être régulièrement surpris par la traversée de lits de rivières asséchées qui occasionnent des bonds chez nos passagers installés à l’arrière. Nous continuons de découvrir les longues étendues clôturées des fermes des Afrikaners et sommes parfois dans l’obligation, pour poursuivre notre route, d’ouvrir et refermer derrière nous les barrières empêchant le bétail de s’échapper de la propriété.
Nous passons par Kamanjab pour faire les courses et le plein d’essence. Mais, nous avons juste totalement oublié que nous sommes dimanche, et de ce fait, tous les magasins sont fermés. Heureusement, la station essence, elle, est ouverte et elle s’avère même être le point de RDV de toute la ville, le centre d’attraction. Tel les points d’eau d’Etosha, nous pouvons observer le va-et-vient permanent des locaux, des Afrikaners dans leur gros 4×4 et de quelques touristes. En ce dimanche, toute la vie se passe ici. Qui dit plein d’essence, dit avoir du temps. En effet pour remplir nos 2 réservoirs, il nous faut a peu près 30 minutes. C’est pour nous l’occasion de découvrir, un peu, la population locale et de prendre des informations sur l’état de la route que nous souhaitons emprunter. En face de la station essence, un seul magasin ouvert, le réparateur de pneus, cela annonce la couleur…
Nous découvrons que les taxi-brousses locaux sont en fait des pick-up où les gens s’entassent à l’arrière avec leurs affaires, bagages, cartons… Notre regard se fixe particulièrement sur un pick-up arrêté juste à côté de nous : à l’arrière, une femme Himba et son enfant en habits traditionnels. Quel contraste étonnant entre modernité et culture ancestrale…
Nous poursuivons notre route en direction du camping de Kwaribe. Les paysages sont époustouflants, nous passons au milieu des montagnes et avons un point de vue imprenable sur les alentours. Notre route nous mène par Palmwag, petite ville qui signe l’entrée de la région Kunene et qui est l’occasion pour les autorités d’imposer un contrôle vétérinaire. En effet, il marque la « frontière » entre les grandes fermes des Afrikaners et les territoires gérés essentiellement par les communautés locales (« conservancies »). Ces conservancies ont pour but de gérer non seulement la préservation des animaux sauvages mais participent également à la vie touristique (gestion de campings de communauté) et administrative locale. Dans la région, 3 ethnies prédominent : les Himbas, les Héréros et les Damaras. Ici, pas de fermes, ni de farmers Afrikaners, l’occasion pour nous de comprendre et de connaître un peu plus ces différentes cultures.
Nous arrivons au camping de communauté de Kwaribe à la nuit tombée. Il est magnifiquement situé au fond d’une vallée entourée de montagnes qui rougissent aux derniers rayons du soleil. Au pied d’une falaise coule un ruisseau offrant un véritable oasis de verdure dans ce paysage désertique. Ici, pas d’électricité, et l’eau chaude est chauffée chaque matin et chaque soir au feu de bois. L’endroit est particulièrement paisible et très bien aménagé en matériaux naturels et recyclés.
Nous organisons dès le lendemain une sortie avec un guide local pour visiter un peu les alentours et surtout rencontrer des Himbas. Nous passons donc une matinée dans un de leurs villages.
La rencontre est insolite, même si on les sent habituées à voir des touristes. L’échange est amusant, le guide leur propose de commencer par nous poser quelques questions sur notre façon de vivre, nous jouons le jeu et répondons sincèrement puis le jeu s’inverse. L’échange est agréable et enrichissant. Tous les sujets sont abordés : mariage, religion, mort, vie quotidienne, argent, enfant… Nous apprenons un peu sur leur vie et leur quotidien. Peuple semi-nomade, les himbas se déplacent pour chercher de l’herbe pour nourrir leur cheptel. Ils vivent surtout de l’élevage de chèvres et de bovins. Les hommes partent avec le troupeau pendant plusieurs jours, tandis que les femmes restent avec les enfants pour gérer la vie du village. Vient ensuite l’inévitable vente de l’artisanat (bijoux, poupées…) et la séance photo.
Malgré notre échange sincère et authentique, nous repartons avec un sentiment mitigé comme l’impression de n’être qu’un touriste de plus, l’occasion pour elles d’un apport financier et alimentaire plus que d’une rencontre partagée…
L’après midi, le guide nous emmène à une belle cascade proche du camp. Nous en profitons pour nous baigner dans l’eau est transparente entourée d’une végétation luxuriante, un petit instant magique et rafraîchissant dans ce pays si sec. A notre sortie, la mauvaise surprise ce sont les 20aine de petites sangsues qui ont colonisé nos pieds et nos jambes.
Après une seconde nuit dans notre camping préféré, nous poursuivons notre route dans la Kunene region et nous dirigeons vers Opuwo, la « capitale » des Himbas. Sur la route qui nous y mène, nous décidons de prendre en stop une femme Himba et son enfant. Les transports en communs étant inexistants, le seul moyen de circuler est le stop. Nous découvrons que prendre en stop une femme himba comporte quelques risques pour la voiture. En effet, l’habit traditionnel himba consiste à porter, pour faire simple, une peau de chèvre autour de la taille et de s’enduire tout le reste du corps d’un mélange de graisse animal et d’ocre. Par conséquent, le moindre contact avec leur peau est marqué par une couleur marron et une odeur très particulière. Pour compliquer le tout, les femmes portent une coiffe réalisée à partir de peau de chèvre qu’elles enduisent également de la même substance. Par chance, nous avions préparé une « serviette à himba » avant de la faire monter et les femmes, habituées à circuler en voiture, préparent également un tissu pour se couvrir et limiter les dégats. Arrivés à Opuwo, nous évaluons l’intérieur de la voiture. Seul le plafond a souffert un peu de la coiffe en peau de chèvre ainsi que la poignet de porte. Il faudra juste penser à shampouiner un peu le plafond avant de rendre la voiture, mais c’est un moindre effort en comparaison de la nature insolite du moment.
Après un ravitaillement global à Opuwo, nous commençons réellement l’aventure puisque nous empruntons une piste réputée mauvaise au point que notre agence de location nous indique que c’est à notre propre risque s’il arrive quoique ce soit sur cette route. Nous nous sommes bien évidemment, au préalable, assurés auprès de locaux que la route soit praticable pour des novices comme nous. Cette route se révèle mauvaise mais faisable. Elle donne lieu à un spectacle époustouflant en terme de paysages : plaines sableuses, montagnes, oasis près de rivières et toujours ce paysage si typique, une immense plaine à perte de vue et comme posée dessus, un petite montagne sortant de nul part. Sur le trajet nous perturbons quelques animaux sauvages (girafes, oryx, springboks, autruches) en plein repas. C’est d’autant plus excitant de les voir que cette fois-ci c’est dans la nature et non pas dans une réserve. La fin de journée donne lieu à des couleurs éclatantes, un rouge presque ocre, sur la roche.
Nous arrivons en fin de journée, juste après le coucher de soleil, dans notre nouveau camping de communauté, bien isolé à 25 km de la « route pricinpale ». Malgré nos doutes et inquiétudes, nous voici bien arrivés au « Marble camp ». Petra et Patrick en rêvaient depuis des semaines et c’est chose faite. Nous nous retrouvons seuls dans ce petit camping de 5 emplacements au pied d’un lit de rivière asséché. Le personnel est toujours aussi accueillant et attentif, les structures toujours aussi bien intégrés à l’environnement et bien entretenues. Nous resterons ici 2 nuits, l’occasion pour nous de se reposer et de profiter des environs pendant une journée complète.
Nous en profitons pour aller rencontrer un nouveau village Himba. Il s’agit un village permanent, les femmes semblent attendre les hommes partis avec le cheptel. Seul un homme est présent, il est âgé et assis dans un grand cercle formé par des pierres. Ce cercle est en réalité l’un des points centraux du village : le feu sacré ou « holy fire » important pour le culte des ancêtres sur lequel repose l’essentiel des croyances et cultes religieux himbas. Ce « holy fire » est situé au centre, dans l’alignement de la maison du chef du village et de l’enclos pour les bêtes. Les maisons ou huttes présentent un toit arrondi, les murs sont composés de morceaux de bois recouverts d’un mélange de terre et de bouses de vaches. LA grande différence par rapport à notre précédente rencontre avec les himbas, réside dans le fait que, cette fois-ci, les femmes n’attendaient pas de touristes : pas de souvenirs à proposer, elles continuent leur travail quotidien de confection de leurs habits traditionnels en peau de chèvre ou d’agneau. Par conséquent, passé un petit quart d’heure d’observation et de retenue mutuelle, le dialogue et la rencontre semble plus naturelle, plus sincère. Nous guide nous sert d’interprète. Très rapidement, les femmes fières de leur costume, s’apprêtent, se parent de leurs plus beaux bijoux et atours
pour une séance photo spontanée. Nous nous faisons un plaisir de leur montrer le résultat sur l’écran de l’appareil photo numérique. Simon inverse les rôles et se fait prendre en photos par une des femmes du village, Laure dessine quelques silhouettes avec de l’ocre himba qu’elle a rajouté à sa palette de couleurs. Cela donne lieu comme d’habitude à beaucoup de rires et d’interrogations. Au bilan, nous nous rendons compte que bien qu’il ne se soit pas passé grand chose durant cette rencontre, nous avons passé un excellent moment, sincère, spontané et plein d’authenticité avec ces femmes et elles aussi paraissent ravies. Un très bel instant qui restera gravé dans nos mémoires.
Le lendemain, nous repartons sur notre « piste interdite ». Celle-ci reste finalement praticable malgré des « mini-vagues » sur le sol mettant légèrement à mal nos amortisseurs et nos nerfs. Le décor reste splendide. Durant le trajet de 4 heures, nous ne croisons personne : aucune voiture, aucune âme qui vive. Entre montagnes et désert, la « Skeleton Coast » n’est plus très loin. Nous arrivons sur les hauteurs de Purros, le spectacle est époustouflant. La végétation verdoyante serpente en suivant le lit de la rivière asséchée, offrant ainsi un contraste saisissant avec les dunes et le désert qui l’entoure. La vallée de Purros est réputée pour ses éléphants sauvages ou « éléphants du désert ». Par conséquent, nous devons faire attention à ne pas les attirer avec notre nourriture au risque de se réveiller nez-à-trompe avec un pachyderme.
Le lendemain, nous sommes heureux de rejoindre la route autorisée par l’agence, nous pourrons nous faire dépanner s’il se passe quoi que ce soit. Toutefois, avant de rejoindre cette route, une nouvelle épreuve nous attend, il nous faut franchir le lit de la rivière. Epreuve qui se révèle plus compliquée que prévue puisque tout le lit n’est que sable et arbres, pas de piste damée en perspective. Nous n’avons pas le choix, après plusieurs tentatives et une prospection piétonne collective, nous entamons les hostilités. Nous devons faire vite car nous apercevons un ou 2 éléphants rôder dans les parages. Finalement, Simon s’en sort comme un chef et nous sortons de ce traquenard sans encombres.
Après 4h de piste, nous arrivons à Seisfontein, où nous faisons une pause pique-nique dans un ancien fort transformé en magnifique lodge : une petite terrasse ombragée et une piscine pour se rafraîchir, une salle à manger avec des imposants canapés en cuir pour se reposer, en bref, tout de l’image d’un lodge namibien luxueux. Nous parvenons au camping d’Aba huab après une longue journée de route. Après quelques jours hors des sentiers battus, nous retrouvons la route plus classique et par conséquent, son lot de touristes avec…Mais pourquoi tant de touristes par ici ? La suite au prochain épisode…