Une autre réalité

Suite à notre dernière panne mécanique, notre dernière partie du voyage se retrouve totalement imprévue et improvisée. Au revoir Sossusvlei pour Simon, au revoir Mariental pour Patrick. Nous devons rayonner dans un périmètre qui nous permette de revenir à temps pour rendre la voiture. Nous voulions visiter un camp de Bushmen à l’ouest de Windhoek et en profiter pour retourner à Spitzkoppe mais le camp Bushmen est fermé, nous obligeant à revoir totalement notre itinéraire. Total revirement de situation, nous nous décidons finalement de nous diriger vers l’Est pour nous rapprocher du pays des Bushmen. Après une après-midi sur une route goudronnée, nous arrivons dans une ferme près de la frontière du Botswana qui se révèle un peu moins charmante que l’annonce faite sur le guide. Nous ne nous y attarderons pas plus d’une soirée, le temps de fêter réellement les 30 ans de Petra avec un petit gâteau, un petit cadeau et quelques bougies !!

Le lendemain, nous décidons à contre cœur, de ne pas nous rendre dans le village des bushmen que nous avions repéré. Trop loin sur une piste secondaire et refroidis par notre agence préférée, nous ne voulons pas multiplier les risques d’aggraver notre cas.

Nous préférons aller dans un camping proche de la ville de Gobabis, pour aller à la rencontre des Tswana (une autre ethnie). Finalement, notre choix nous permet de vivre de très jolis moments et de profiter pleinement du peu de temps qui nous reste. A l’initiative du projet, 5 femmes sans emploi qui ont développé un camping pour touristes tout en faisant participer tout le village.
Au programme du jour : visite du village et rencontres de ses habitants. Nous visitons donc l’école (pendant les heures de cours bien sûr!), l’église, la brasserie locale (bière fermentée aux haricots locaux, très bonne au demeurant), le bar, la maison de soin, la boulangerie (nous y dégustons du pain sortant du four… Miam).
Après un beau parcours dans le village, nous assistons à un spectacle de danses traditionnelles réalisées par les enfants du village et le soir, nous écoutons des chants traditionnels autour du feu. Les chants sont justes, l’ambiance est joviale (on sent le plaisir pour eux de chanter ensemble) et la beauté des voix sous un ciel étoilé, on ne s’en lasse jamais.

Le lendemain, nous revenons doucement sur nos pas pour nous rapprocher de la capitale. Petra et Laure voudraient faire un petit atelier d’artisanat local avec les Bushmen. Nous partons donc à la recherche d’un camp bushmen qui fabrique des bracelets typiques en coquille d’oeuf d’autruche. Nous nous arrêtons à Drimiopsis, un camp construit par le gouvernement pour une sédentarisation des Bushmen. Nous ne trouverons pas les fabricants de bracelets mais découvrirons une réalité namibienne peu mise en valeur dans les guides touristiques. Les San ou Bushmen, petite minorité en Namibie, est incitée indirectement à se sédentariser. Les farmers locaux disposant de la plupart des terres, les Bushmen ne peuvent plus chasser que dans des zones restreintes, rendant difficile l’une de leurs principales activités et mettant en péril, leur survie, tout simplement. Ils se retrouvent donc, malgré eux, contraints de se sédentariser dans des « villages » créés pour eux. Abandonnant leur caractère nomade, ils perdent, dans le même temps, leur mode de vie. Des écoles sont créées pour « éduquer » les enfants, des missionnaires aident à la formation des adultes dans quelques métiers pour leur permettre d’avoir un revenu. Le monde occidental continue son expansion mais beaucoup plus insidieusement qu’à d’autres époques.

Dans la suite logique, et comme si notre journée devait être rythmée par une autre réalité, notre pause à Gobabis, pour le déjeuner, nous permet de rencontrer Peter. Namibien d’origine Herrero, il a monté son entreprise de tourisme seul, après avoir travaillé pour des agences de voyages à la capitale. Il nous raconte l’histoire de la Namibie depuis sa colonisation. Nous découvrons la période allemande et la répression des peuples originels puis la période sud-africaine et le début de l’apartheid aussi en Namibie. Il nous semble que l’occident a encore beaucoup d’excuses à rendre à l’Afrique. Le plus impressionnant est la philosophie avec laquelle les namibiens ont l’air de vivre toute cette histoire. L’indépendance a donné un souffle d’espoir à tous ces peuples dont la rancoeur ne semble pas être bouillonnante. L’histoire est ce qu’elle est, il faut vivre avec et maintenant construire en allant de l’avant. Impressionnante leçon d’humilité…

Après cette discussion très enrichissante, nous rentrons à la capitale pour dormir à Penduka, notre dernier camp communautaire du séjour. Penduka
est une association créée par une hollandaise pour valoriser l’artisanat des femmes sans emplois du quartier pauvre de Windhoek, Katutura.
La petite entreprise est devenue grande (après 20 ans d’existence, les femmes sont passées de 4 à 60) et l’artisanat varié.
Nous nous posons pour la dernière fois avec notre 4×4 dans ce camping, ouvrons pour la dernière fois nos tentes et allumons pour la dernière fois un feu. La vue est magnifique sur le « lac » de Windhoek qui reflète les lumières de la ville.

Le lendemain, nous visiterons le quartier de Katutura, le quartier dans lequel les noirs ont été contraints de s’installer (qui est l’équivalent de Soweto à Johannesburg que nous détaillerons plus tard). Nous découvrons également avec émerveillement, l’artisanat de Penduka et les femmes qui y travaillent. De la poterie, de la broderie et de la couture, des batiks, des bijoux en verre recyclé. L’ambiance est joyeuse, les femmes semblent heureuses de travailler ici et les touristes affluent en masse. Un bel exemple de projet de développement durable qui a réussi.

Nous rendons notre voiture en fin de journée après avoir eu une dernière discussion avec notre ami Afrikaner préféré. Pas d’autre souci signalé sur la voiture, pas de caution prélevée, l’hémorragie financière est jugulée.  La fin de notre séjour, nous permettra de découvrir un peu plus la capitale. Quelques bâtiments historiques nous rappellent l’implantation allemande originelle. Nous finissons notre voyage par une bonne séance de shopping au « Craft center » et un délicieux restaurant portugais qui est pour nous l’occasion d’une dernière dégustation de l’excellente viande d’Oryx et de Kudu.

Nous laissons Patrick et Petra le samedi 28 juillet, non sans nostalgie et émotion de ce mois passé ensemble.

Merci encore à vous 2 pour cette fabuleuse aventure riches en (més)aventures et en découvertes passionnantes !!!!

Nous compatissons quant à leur retour à la vie active tandis que nous continuons notre aventure par un trajet de 26h en bus, assommés par des films et clips chrétiens qui passent en boucle, pour rejoindre l’Afrique du Sud . Le paysage durant le trajet est peu varié, nous longeons par le sud le désert du Kalahari. Nous roulons pendant des heures sur une route rectiligne, plane, longée par les poteaux électriques à perte de vue.

Johannesburg sera pour nous une ville de transit. En effet, celle-ci est réputée peu sûre et il nous reste que 3 jours avant un nouveau départ. L’envie de découverte n’en est pas moins grande. Nous décidons donc de visiter Soweto grace à la guesthouse dans laquelle nous logeons qui organise un tour en vélo dans le quartier. Durant notre visite, nous réalisons le parallèle avec Katutura à Windhoek. Les pays sont différents mais l’histoire semble la même. Katutura veut dire, « le lieu où on ne veut pas vivre », Soweto veut dire « South West Township ». Dans les 2 cas, ces quartiers sont nés du déplacement des populations noires pour laisser aux blancs colons les meilleurs quartiers de la ville. Dans les 2 cas, le quartier était divisé en bloc où les différentes ethnies étaient séparées et cloisonnées. « Diviser pour mieux régner » semble avoir été la philosophie sud-Africaine durant toutes ces années. Soweto a subi l’aparthied pendant plus longtemps et plus fortement. Les couvres-feu, les droits d’accès au centre ville limité en terme d’horaire et de temps par des permis délivrés par la police, la scolarité différente et l’accent mis sur la formation dans des métiers manuels. Nous finissons notre visite avec émotion en visitant le mémorial des étudiants victimes en 1976 de répressions pour avoir manifester leur désir de liberté et la maison de Nelson Mandela.

Nous quittons l’Afrique du Sud, et par la même occasion, le continent africain le 2 août non sans un pincement au cœur après ces 3 mois fabuleux qu’il nous a offert. Nous partons avec pleins d’images en tête, le sentiment d’un continent plein de vie malgré la pauvreté et les souffrances endurées et enfin un léger sentiment de honte au vue de l’histoire de ce continent complètement pillé par l’Europe.

Par ici les dernières photos de Namibie 

Après 3 mois de voyage, notre aventure continue vers une culture aux antipodes. L’Inde nous ouvre grand ses bras. La suite dans 1 ou 2 mois… A bientôt tout le monde…

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